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Moyens de communication, mobilisation rapide et actions préventives contre la guerre : analyse de la mobilisation pacifiste actuelle en Occident contre la guerre en Irak.

avril 2003, par Steve Breyman

La scène internationale n’attend plus que la guerre commence pour s’y opposer… Utilisant les moyens de communication interactif, les mouvements pacifistes construisent de nouvelles formes de mobilisations internationales contre la guerre. Steve Breyman, professeur associé au département de Sciences et techniques de l’Université de Rensselaer (Troy - New York), mais aussi engagé dans les mouvements écologistes, témoigne de cette évolution de méthode, qui est aussi une réflexion sur la stratégie préventive des associations pacifistes.

Le mouvement pacifiste qui traverse actuellement l’occident possède trois caractéristiques qui le distingue des précédents : premièrement, grâce au progrès des Technologies de l’Information de la Communication (TIC), les organisations communiquent entre elles instantanément et en continue ; deuxièmement, le temps nécessaire au rassemblement pacifiste pour se constituer et devenir actif est plus court que pour toutes les mobilisations passées ; troisièmement, le mouvement de contestation actuel est apparu avant le déclenchement de la guerre proprement dite. Cet article présente et illustre ces trois phénomènes interdépendants. Il s’achève sur quelques réflexions à propos de deux événements politiques récents, et sur l’issue probable du mouvement opposé à l’invasion de l’Irak.

Les moyens de communication

La communication constitue l’énergie vitale de tout mouvement. En simplifiant (peut-être trop), on peut diviser les types de communication des militants pacifistes en deux : internes (à l’intérieur des organisations et entre elles) et externes (en dehors des organisations). Les communications internes permettent aux ONG membres du mouvement de coordonner leurs activités, de mobiliser des ressources, de débattre de la tactique et de la stratégie, de se regrouper avec les organisations appartenant au même courant de pensée, de se soutenir le moral, de faire partager l’engagement pour la cause, et de mener toute autre opération leur permettant d’apparaître comme des entités citoyennes cohérentes.

Les communications externes forment les échanges symboliques entre les organisations membres du mouvement, des individus non engagés, les autorités politiques et les média. Les publications des ONG, les appels à manifestation, les communiqués de presse doivent impérativement toucher un public non mobilisé le plus large possible pour maximiser les efforts de mobilisation menés par les militants. Sans couverture médiatique, l’existence du mouvement ne serait connu que par quelques observateurs, au moins dans les premières phases de la mobilisation. Les organisations impliquées communiquent parfois directement
avec les autorités étatiques mais le plus souvent via le filtre des média.

Ce n’est que depuis les années 1990 que la plupart des gens se sont familiarisés avec l’Internet et ont participé à la croissance exponentielle du réseau. Ni les e-mails ni les sites Internet n’étaient disponibles pour les millions de personnes qui ont combattu la guerre du Vietnam ou se sont mobilisées contre l’éventualité d’une guerre nucléaire au début des années 1980. Même les efforts pour arrêter la guerre du Golfe en 1990-91 se sont majoritairement appuyés sur des technologies de communication assez anciennes. Comme moyen d’action pour faire pression sur l’Etat et convertir des alliés potentiels, les militants disposaient du téléphone (sans répondeur ni fax dans les années 60 et 70), des revues, des manifestations publiques et de la couverture médiatique. Les ONG ne contrôlaient pas directement les messages diffusés par les média, même s’ils étaient souvent relayés par la presse, la radio et la télévision.

Les TIC offrent des possibilités inégalées aux mouvements de contestation. C’est bien l’un des rares domaines où la "promesse démocratique" de l’Internet - souvent invoquée mais si peu réalisée - a trouvé une application. Les organisations pacifistes (les nouvelles comme les historiques) ont toutes aujourd’hui leur propre site web et leur liste de diffusion, qu’il s’agisse de petites associations de terrain ou de collectifs ponctuels se développant à l’occasion d’une situation d’urgence. D’un simple clic, des messages d’alerte incitant à des actions immédiates peuvent être envoyés à des dizaines voire centaines de milliers de sympathisants sur l’ensemble de la planète. Pour qui connaît le béaba de l’informatique, il est très facile techniquement de recevoir presque toutes les heures des nouvelles des mouvements pacifistes situés au quatre coin du monde. Et il est tout aussi facile pour les militants de répondre à ces messages d’alerte. Il n’est pas rare que des ONG aient des lettres-type à adresser aux gouvernants que chacun peut envoyer (par la poste, par mail ou par fax). (Mais cette pratique est devenue tellement courante que les gouvernements en viennent à ne plus tenir compte de cette forme de communication…)
Les nouvelles technologies ont amélioré les communications internes et externes des ONG. Cette capacité nouvelle permettant de toucher rapidement les groupes pacifistes - à la fois de l’intérieur et à l’extérieur - a rendu possible la mobilisation rapide et massive contre la guerre que nous connaissons aujourd’hui.

Une mobilisation de plus en plus rapide

Le précédent record de vitesse pour l’organisation d’une mouvement anti-guerre était détenu par les campagnes "Pas de sang pour le pétrole" qui avaient envahi l’Europe de l’Ouest et l’Amérique du Nord pour empêcher le gouvernement de "Bush père" de faire la guerre à l’Irak. Dès l’automne 1990 - bien avant le déclenchement de l’opération "Tempête du désert" - des centaines de milliers de citoyens s’étaient retrouvés lors de manifestations tumultueuses.
Que ce mouvement du début des années 1990 ait échoué à empêcher la guerre contre l’Irak n’atténue en rien sa principale caractéristique : sa montée en puissance extraordinairement rapide. A comparer aux nombreuses années (de 3 à 6 selon l’étape de l’engagement armé américain retenu) qu’il a fallu au mouvement contre la guerre du Vietnam pour se mettre en branle. Et aux 18 à 24 mois nécessaires à la contestation contre les euro-missiles et aux mouvements favorables au gel des installations militaires pour se faire entendre du grand public. Quant à la mobilisation actuelle contre une éventuelle deuxième guerre du Golfe, elle est arrivée sur le devant de la scène encore plus rapidement que lors de la première.

Une autre explication tient à la "pré-mobilisation" qu’a constitué la guerre en Afghanistan, et la dénommée "guerre contre le terrorisme". Parmi les organisations et les personnes qui manifestent leur opposition à la future guerre en Irak, nombreuses étaient celles qui protestaient déjà contre les opérations menées par les britanniques et les américains contre les Talibans. Elles descendent également dans la rue contre les atteintes de plus en plus nombreuses aux droits civiques des personnes suspectées de terrorisme, des étrangers sans papiers et des " personnes dignes d’intérêt " selon les mots employés par le Ministre de la Justice américain John Ashcroft.

Ce départ précoce a été conforté par le mouvement de solidarité avec le peuple palestinien. Comme pour la "guerre contre le terrorisme", de nombreuses organisations engagées dans la lutte contre la guerre en Irak étaient mobilisées pour dénoncer la politique israélienne dans les territoires occupés. D’ailleurs, la plus importante manifestation de soutien aux palestiniens qu’ait connu le sol américain a eu lieu le 20 avril 2002 à Washington, avant que l’attention de G.W Bush ne se focalise sur son ennemi préféré au sein de l’ "axe du mal", Saddam Hussein. De telles manifestations se sont aussi déroulées sur l’ensemble du territoire de l’Europe de l’ouest.

Mais le fait que la mobilisation contre la guerre de G.W.Bush ait pu bénéficier d’une "période d’échauffement" s’inscrit dans le contexte historique général de ce type de mouvement. Pendant les périodes de paix relative ou de conflits "mineurs", les réseaux pacifistes sont dormants. Lorsqu’une guerre se termine ou que les tensions se relâchent, les mouvements pacifistes entrent dans la phase de "noyau dur" comme le disent les théoriciens. A la mobilisation maximale succède une dépression. Les pacifistes "professionnels" (salariés à temps plein des ONG les plus importantes) prennent le dessus sur les pacifistes "amateurs" (comme les militants occasionnels).

Ce qu’il importe, c’est de pouvoir facilement mobiliser les militants pacifistes. Il faut avant tout réveiller les réseaux pacifistes dormants, puis inciter à l’engagement militant actif. Les groupes pacifistes doivent travailler à l’élaboration d’une vision partagée des menaces s’opposant aux valeurs pacifistes, puis de trouver un consensus sur les actions à entreprendre pour réduire ou supprimer ces menaces.
Le passage de la prise de conscience à l’action demande trois éléments : un ennemi identifié, des événements catalyseurs, de l’éducation et de la communication. Un ennemi identifié - un complexe industriel, une décision de justice, un système d’armement - fournit la menace tangible autour de laquelle mobiliser. Le déploiement en cours de dizaines de milliers de soldats américains et britanniques dans le Golfe a déclenché les manifestations pacifistes les plus importantes depuis le début des années 1980 et la campagne contre la guerre nucléaire. L’invasion en tant que telle mettrait dans la rue une foule encore plus nombreuse. Les événements catalyseurs - des accidents, la mise en place d’une nouvelle politique, des propos déplacés de membres du gouvernement - constituent des événements imprévisibles qui, lorsqu’ils se produisent, soutiennent la mobilisation. Souvent, ce sont les intellectuels du mouvement qui les interprètent. Les événements ne sont pas catalyseurs en eux-mêmes. Ils doivent être transformés comme tel. La réponse de G.W.Bush aux événements du 11 septembre consistant à accorder la priorité à la guerre sur la diplomatie et au respect du droit a clairement catalysé des oppositions diverses. Les évènements catalyseurs ne sont pas spécifiques aux mouvements pacifistes, on les trouve également dans tout mouvement social, et dans tout mouvement de masse.
L’éducation et la communication, tout ce qui constitue les échanges internes et externes, sont essentiels pour gagner le ralliement des citoyens à la cause pacifiste. Le public a besoin d’être sensibilisé pour descendre dans la rue. L’éducation permet également aux personnes impliquées dans le mouvement de réaliser une critique informée des stratégies et politiques officielles. De nombreux citoyens ordinaires acquièrent une réelle expertise technique sur les questions liées à la guerre, aux politiques de défense et au contrôle des armes. Les organisations pacifistes semblent avoir déjà apportées tous les contre-arguments aux raisons invoquées par les secrétaires d’Etat Rumsfeld et Powell ainsi que par le vice-Président Cheney et le Président Bush pour déclencher la guerre.
Mais elles ne se sont pas arrêtées là. Elles ne se sont pas contentées de contester les arguments officiels avancés pour mener une action militaire à l’étranger ou restreindre la liberté d’expression dans le pays. Elles ont - et c’est là que la communication prend toute son importance - avancé leur propres explications à la dérive guerrière américaine et à la mise en place d’une régime plus autoritaire. Aux yeux de la majorité des occidentaux critiques de la politique de G.W Bush, la prochaine guerre du Golfe comme la première possède une seule raison : la contrôle des réserves pétrolières mondiales [1].

Prévenir plutôt que dénoncer

Travailler à prévenir les guerres avant qu’elles ne commencent n’est pas chose nouvelle. Mais cet objectif est rendu à la fois plus important et plus difficile dans le contexte contemporain. Les pacifistes ont vu arrivé les première et deuxième guerres mondiales et ont fait tout ce qui était en leur pouvoir pour les empêcher. La différence avec cette époque est que les "grandes puissances" (surtout les Etats-unis) possèdent partout dans le monde une armée professionnelle opérationnelle dans un délai beaucoup plus bref que par le passé. Certaines armes (l’aviation et les missiles de croisière) peuvent être utilisées dans les minutes qui suivent la décision prise au plus haut niveau d’engager une action militaire.

C’en est fini des longues périodes de préparation nécessaires aux guerres du XXe siècle. Les conflits armés du XXIe siècle qui impliqueront les Etats-Unis seront des "guerres instantanées". Des moyens militaires impressionnants traversent le ciel, les océans (à la surface et dans les profondeurs), et les continents 24 heures sur 24, 365 jours par an. La préparation de la guerre ne prend jamais de vacances. Ce haut degré de préparation des armées (encore une fois essentiellement celle des Etats-Unis) complique fortement la tâche des pacifistes.

Alors que des opérations à grande échelle comme la Guerre du Golfe et la future invasion de l’Irak nécessitent encore des semaines et des mois de préparation, des attitudes va-t-en-guerre peuvent dégénérer en confrontations militaires immédiates. Les mouvements pour la paix peuvent cependant obliger leur gouvernement respectif à agir avec prudence et ainsi tempérer leurs ardeurs à provoquer des conflits armés. La communication en continue des organisations pacifistes contre le syndrome du "tirer plus vite que son ombre" a pour effet de contenir la volonté des Etats de tirer d’abord et de réfléchir ensuite. Des actions dynamiques pendant la phase de tensions qui précède la guerre obligent des hommes politiques comme G.W Bush à ne pas mettre trop vite la main sur le revolver. (Même si dans le cas qui nous occupe, des combats contre les militaires et les civils irakiens ont lieu presque chaque jour dans des zones d’interdiction de vol contrôlées par les britanniques et les américains sans mandat des Nations-unies).

D’un coté, la situation actuelle fournit au mouvement pacifiste davantage de ressources de mobilisation et d’influence que celles dont disposait celui qui s’est déclenché pour empêcher puis dénoncer la guerre du Golfe. Alors qu’en 1990, l’armée de Saddam Hussein avait envahi et occupé le Koweit, on ne relève aucun agression similaire aujourd’hui. La controverse actuelle tourne plutôt autour des accusations américaines concernant la recherche, le développement et le stockage par l’Irak d’armes de destruction massive.

Au cœur du sujet se trouve le processus d’inspection de cet armement. L’ancien inspecteur chargé du contrôle de ces armes, Scott Ritter, estime que la Guerre du Golfe et les inspections qui en ont résulté ont abouti à la destruction de quelque 90 % des armes de destruction massive que possédait l’Irak. Les inspecteurs actuellement en Irak n’ont toujours pas découvert ce que les média américains appelle le "smoking gun" (flagrant délit, des preuves incontestables de la présence d’armes de destruction massive ou des programmes de développement de telles armes). En l’absence de preuves concrètes, les alliés potentiels ne se sont pas ralliés à la cause américaine et les gouvernements français et allemand s’opposent maintenant publiquement aux arguments des Etats-Unis en faveur de la guerre. Il ne fait pas de doute que la mobilisation massive pour la paix en Europe et en Amérique du Nord aident Chirac et Schröder à rester fermement sur leur position.

De l’autre côté, il reste aux mouvements pacifistes contemporains à définir comment ils peuvent s’opposer à des armées prêtes à agir en permanence. Car, malheureusement, le Président Bush pourrait déclencher une attaque massive réalisée à partir de missiles de croisière et de bombardements aériens dès demain. Et, dans l’état actuel des choses, le rassemblement pour la paix ne pourrait l’en empêcher. Reste qu’heureusement une invasion à grande échelle dont le but est de changer le régime en Irak nécessite des mois de préparation. Les forces britanniques et américaines sont aujourd’hui presque suffisantes pour mener à bien cette invasion. De nouvelles pistes d’atterrissage ont été construites et les ressources humaines et matérielles sont en place. Des forces navales extraordinairement puissantes attendent au large. Si l’on excepte l’attention portée à l’opinion publique mondiale et aux relations avec les autres Nations (questions qui jusqu’à présent n’ont pas pesé lourd dans les choix de politique étrangère du Président Bush), rien ne peut expliquer l’absence d’invasion que le pouvoir des mouvements pacifistes. Les efforts des militants pour empêcher l’invasion de l’Irak ont pour le moment été couronnés de succès.

Conclusion

La crise actuelle éclaire de manière intéressante deux phénomènes. Dans le domaine des communications, l’émergence de médias indépendants au niveau mondial joue un rôle tout particulier dans la mobilisation. Découverts par le public à l’occasion des manifestations anti-OMC de Seattle en novembre 1999, les médias indépendants ("Indymedia") (des citoyens ordinaires munis de caméras et de magnétophones) défient le monopole des entreprises de presse et de l’audiovisuel pour définir ce qui doit figurer dans les journaux et passer à la télé et à la radio. "Ne vous plaigniez pas des médias, devenez les médias" est l’un des slogans des Centres des Médias Indépendants (on trouve une dizaine de CMI dans le monde aujourd’hui). Les citoyens les mieux informés ont maintenant accès à des opinions contradictoires sur les mouvements sociaux (même si très peu ont connaissance du travail des CMI).

Et l’on ne peut que s’en réjouir. Jusqu’à très récemment, si un citoyen n’avait compté que le New York Times pour sa compréhension du nouveau mouvement pacifiste américain, il n’en aurait eu qu’une perception très partielle. Et ce qu’il en "saurait" serait passé par un filtre idéologique si dense qu’à la lecture des articles les militants pacifistes ne reconnaîtraient que de loin leurs propres idées.

L’autre phénomène à souligner est que les Verts allemands, leaders internationaux de la contestation pacifiste depuis le début des années 1980 sont de plus en plus impatients et mal à l’aise. Le point culminant de la prise de contrôle depuis le début des années 1990 des "réalistes" sur l’aile la moins modérée fut la douloureuse approbation par le parti de la participation militaire passive des Allemands à la guerre en Afghanistan. Le vote troubla les sympathisants verts dans le monde entier : le propre parti de Petra Kelly donnait son accord pour une opération que ses camarades partout ailleurs désapprouvaient pour une multitude de raisons. La politique des alliances prenait le dessus sur les valeurs historiques du mouvement, comme cela arrive souvent. Fischer, le populaire leader écologiste et ministre des affaires étrangères, affirmait que "si les Verts voulaient rester à l’intérieur de la coalition avec le SPD pour gouverner l’Allemagne fédérale, alors les valeurs devaient s’effacer devant les réalités politiques".

Mais les agissements actuels des Etats-Unis contre l’Irak dépassent ce que des Verts même " pâles " et des sociaux-démocrates pacifistes peuvent accepter. Le chancelier Schröder doit déjà faire face à un mouvement pacifiste au sein duquel se comptent nombre de ses partisans et des soutiens des Verts. Plier devant G.W Bush mettrait en danger son alliance de gouvernement. Soutenu par la Chine, la Russie et la France au Conseil de sécurité des Nations-unies, Schröder est en capacité de demander à ce que les inspecteurs de l’ONU disposent de plus de temps et de s’opposer à une guerre immédiate. Pour le moment, les valeurs des Verts sont plus fortes que le poids de l’histoire qui pousse l’Allemagne à se ranger derrière les Etats-Unis.

Ceux d’entre nous qui pensaient que l’action du gouvernement de Bush serait en tout point conforme aux discours officiels sont agréablement contredits. La rhétorique officielle essaye de convaincre l’opinion publique américaine avec un certain succès. Mais le mouvement pacifiste opposé à la guerre en Irak, semble avoir repris la main, l’opinion publique américaine se ralliant peu à peu au point de vue dominant dans le reste du monde.

Malheureusement quand bien même la mobilisation pacifiste réussirait à empêcher la guerre en Irak, un nouveau conflit pointera toujours à l’horizon. A défaut d’un changement radical de la gouvernance mondiale et des valeurs qui la sous-tendent (qui ne peuvent elles-mêmes se modifier que par les mouvements sociaux), la résolution non violente des conflits à l’échelle nationale et internationale sera toujours liée à la pression citoyenne sur les Etats.
Le jour n’est pas encore venu de ranger nos panneaux et nos banderoles.

Propos traduits par Pascal CANFIN


Steve Breyman a récemment publié "Why Movements Matter" (SUNY Press, 2001). Sur les mouvements pacifistes américains, on pourra se reporter aux sites suivants :
– www.pas-en-notre-nom.org
– www.nion.us
– www.peacefultomorrows.org


[1Note de la rédaction : La question énergétique ne nous semble pas suffisante… Dans la continuité de l’analyse de Jerôme Gleizes ("L’affirmation de l’Empire", EcoRev’ n°7), l’acte de guerre américain se conçoit davantage sur l’idée messianique, basée sur l’idée que le modèle américain est universel et généralisable à l’ensemble de la planète. Tout ceux et celles qui ne vont pas dans leur direction sont considéré-es comme des adversaires. Mais les objectifs peuvent être nombreux. Derrière un intérêt particulier, peut se dégager un intérêt général.