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Parution du n° 47 - L’écologie, une politique en actions

dimanche 12 mai 2019, par EcoRev’

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Mélange de pensées globales et d’agir locaux, l’écologie est protéiforme. Elle se déploie dans des domaines très différents qui, en se recoupant et s’intriquant à l’échelle de la société entière, la rendent complexe et in fine la politise. Une spécificité de l’écologie qui, paradoxalement, échappe parfois aux écologistes mêmes, au risque d’une spécialisation critique et d’un enfermement militant.

En partant de la diversité des pensées critiques et des projets de transformations sociales qui ont historiquement structuré le mouvement écologiste, ce numéro propose des « portes d’entrées » thématiques. Sans être exhaustif, il présente des problématiques caractéristiques, dessine des perspectives, pose des interrogations et ouvre au débat.

Il débute avec une question cruciale, au cœur de l’actualité et des revendications des Gilets jaunes : à quelles « Formes de la démocratie » faut-il aspirer pour accroître les marges d’autonomie et le bien-vivre des populations ? À l’heure où la crise écologique se pose au niveau planétaire, à quelle échelle (et comment) faut-il concevoir pour chaque cas la démocratie représentative et les différentes formes de démocratie directe – participative, assembléaire, « projective » ou par consensus ?

Si la démocratie incarne une politique commune visant à réduire l’hégémonie destructrice et spoliatrice des puissants, elle pourrait bien investir les rapports « Nord-Sud ». La mondialisation, qui met à nu les criantes et dramatiques inégalités face à l’insécurité alimentaire, sociale et environnementale, a pour effet d’être au centre d’une possible gouvernance alternative du monde qu’augurent les pays du Sud.

Ce dossier porte également l’accent sur une proposition peu connue, le « Biorégionalisme » – et ses origines états-uniennes. Démarche écocentrée à la fois philosophique et politique, elle conçoit les territoires dans leur unicité et spécificité naturelles, qui accueillent des communautés habitantes, à la fois humaines et non humaines, vouées à vivre en symbiose.

« Que devient la paysannerie », qui façonne nature et paysage ? Elle est l’objet ici de l’amer constat de son long déclin et de son difficile combat, non seulement contre la domination de l’agro-industrie ultra-productiviste, mais aussi parfois contre des normes sanitaires et environnementales imposées de haut, sans respect des spécificités de l’agriculture paysanne et vivrière locale.

Dès lors, se réapproprier la protection de la nature nécessite de revenir aux fondamentaux en questionnant le Grand Partage entre « Humains et non-humains », entre culture et nature, qui a été au fondement de la modernité occidentale. Déconstruire le naturalisme moderne, c’est réinterroger notre rapport au monde, mais aussi agir sur nos manières de faire monde avec les non-humains.

Ce souci est aussi présent dans la réflexion philosophique et spirituelle qui a donné naissance à l’« Écoféminisme ». Ce courant, qui essaie d’échapper aux tentations essentialistes et parfois mystiques qui l’ont traversé, spécialement aux États-Unis, a ceci de stimulant qu’il enrichit l’écologie de ses valeurs sensibles, « corporelles », voire même poétiques.

Enfin, de l’état des « Techniques et modes de production » de l’économie contemporaine à l’ère de l’Internet, il apparaît que des temporalités se côtoient, se nourrissent parfois mais se contrarient dans leurs finalités. L’une est héritière de la logique impérialiste et centralisatrice, qui sied au nucléaire notamment, amenant au déploiement d’un capitalisme 2.0 qui soumet des sous-travailleurs du « clic ». L’autre fait germer un nouveau mode de production entre pairs, non marchand et convivial, à partir d’une même révolution informationnelle.

Ce tour d’horizon fait émerger la force paradigmatique de l’écologie : loin d’être une simple question sectorielle, elle traverse les catégories et les champs. Mais son caractère multiple, illustré par ce numéro, n’est pas de nature à lui donner a priori l’unité politique dont elle aurait besoin : l’« écologie » ne se transcende pas automatiquement en « écologie politique ». Cette unité a du mal à faire l’unanimité – n’y adhèrent pas les environnementalistes, les écologistes libéraux et les diverses franges de l’écologie profonde. Elle relève autant du rejet d’un système capitaliste productiviste qui détruit nature et milieu de vie que de l’élaboration des critères d’autonomie qui président à l’édification d’une société de l’après-croissance. L’écologie politique est donc imperturbablement radicale. Imperturbablement, elle se loge là où ni le capitalisme vert, ni l’expertocratie scientiste, ni encore le bureaucratisme étatique ne peuvent la rattraper. Imperturbablement, elle investit de sa critique les champs économique, social et politique, et traverse et implique toutes les strates de la société pour faire réellement politique. Elle est ce nouveau paradigme appelé à remplacer celui de l’économie politique, non à l’aménager, ni à le verdir ou le moraliser : l’écologie est politique ou elle n’est pas !

La rédaction