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Invitation à occuper un lieu... Comment ouvrir un infokiosque ?

lundi 16 mai 2005, par EcoRev’

Quand dans les années 80/90, l’expulsion des squats s’est intensifiée outre-Rhin et que les librairies engagées ont perdu de leur élan, les "Infoladen" ("infokiosques") ont peu à peu fleuri aux coins des rues. Boutiques aux vitrines militantes, elles sont aujourd’hui le lieu de constitution de réseaux, de rhizomes, comme dirait l’autre. S’y rencontrent des groupes "à gauche de la gauche et non-dogmatiques", tel qu’on peut le lire sur leur site ([http://www.infoladen.de->http://www.infoladen.de), qui investissent le kiosque et l’animent. Un peu à l’image de la Maison des Ensembles, par exemple, qui a existé quelques années durant dans le quartier d’Aligre à Paris.
Le premier ingrédient indispensable à l’ouverture d’un infokiosque, c’est un lieu accueillant. L’idéal, bien sûr, c’est d’en avoir un de libre, prêté par la mairie, par l’Etat, par un généreux donateur... L’alternative, c’est de trouver un lieu vacant qui ne demande qu’à être occupé.

A la recherche d’un lieu...

Tout d’abord, il faut prendre son temps, observer les locaux, pendant six mois environ, se renseigner au cadastre, auprès du voisinage - discrètement évidemment - sur l’identité des propriétaires du lieu. Quant à la situation du lieu, il est toujours préférable pour un infokiosque d’avoir pignon sur rue pour accroître sa visibilité. Lorsque vous aurez acquis la certitude que le lieu retenu est abandonné, le mieux est d’y aller la nuit et de s’y installer. Envoyez-vous auparavant une lettre à l’adresse de ce futur domicile deux jours avant l’occupation (pensez à mettre un nom sur la boîte aux lettres avant). Il y a une protection de l’occupant sans droit ni titre, c’est-à-dire du squatteur, si on peut prouver que celui-ci est dans les lieux depuis plus de 48 heures. On ne pourra alors l’en déloger qu’au terme d’une procédure d’expulsion, qui prendra du temps...
Afin de limiter les poursuites auxquelles vous serez tôt ou tard confrontées, il est préférable que vous trouviez la porte du bâtiment ouverte pour ne pas être accusés d’effraction (c’est-à-dire "le forcement, la dégradation ou la destruction de tout dispositif de fermeture ou de toute espèce de clôture"). Pour réparer la porte et avoir vos propres clefs du bâtiment, prévoyez des vis et des clous, un verrou et des loquets par exemple, à poser sur la porte. Faites un peu de maçonnerie pour que tout soit bien propre et bien solide, réparez les fenêtres et veillez ensuite à bien entretenir la maison pour ne pas être accusés de dégradations ou destruction de biens privés. Pensez éventuellement à faire des photos avant et après l’occupation pour avoir des preuves du respect et de l’entretien des lieux.

Occupation du lieu

Il est important que des personnes logent sur place pour éviter l’expulsion et la fermeture du lieu (sinon on n’est pas protégé comme "occupant" sans droit ni titre), prévoyez donc du matériel de couchage, des lampes de poches, des bougies, de l’eau, de la nourriture, etc. Dans les jours qui suivront l’occupation, il peut être bon d’apporter quelques meubles pour insister sur le fait que le lieu est habité. Faites ensuite installer une ligne téléphonique par France Telecom, la réception des factures facilitera d’autres démarches. Méfiez-vous des incendies quand l’installation électrique est vétuste : vérifiez le circuit, les fusibles...
Il peut s’avérer utile de distribuer des tracts dans les boîtes aux lettres des voisins ou de coller des affiches dans le quartier, annonçant votre décision d’ouvrir un infokiosque en ces lieux. Sur la porte de la maison, affichez vos droits à l’attention des forces de police, l’article 432-8 du code pénal, par exemple :
"Le fait, par une personne dépositaire de l’autorité publique ou chargée d’une mission de service public, agissant dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de ses fonctions ou de sa mission, de s’introduire ou de tenter de s’introduire dans le domicile d’autrui contre le gré de celui-ci hors les cas prévus par la loi est puni de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 euros d’amende." (Ordonnance nº 2000-916 du 19 septembre 2000 art. 3, Journal Officiel du 22 septembre 2000, en vigueur le 1e janvier 2002) et renseignez-vous sur vos droits en général sur le site http://www.legifrance.gouv.fr.
Les expulsions ne peuvent avoir lieu pendant la trêve hivernale (1e novembre jusqu’au 15 mars environ), sauf si le préfet prend un "arrêté de péril imminent" ou d’"insalubrité". En cas d’intervention des forces de l’ordre, d’huissiers ou de toute autre personne souhaitant votre expulsion, évitez autant que possible de les laisser pénétrer le lieu, en évoquant l’article 432-8 et en ne leur donnant pas de justification à une intervention violente. Et n’oubliez pas que vous avez trouvé la porte ouverte en arrivant.

Ouverture de l’infokiosque

L’infokiosque peut avoir diverses activités : il peut faire du prêt de livres, de vidéos, mettre à disposition des tracts, de la documentation, organiser des débats, des projections, des concerts, mettre à disposition une salle informatique, proposer des formations, organiser des actions et des manifestations. Les Infoladen allemands sont aménagés pour accueillir du monde et proposent du thé et des boissons à contribution libre.
Le mieux est encore de prendre exemple sur les activités proposées sur leurs sites (le Baobab ou le Bandito Rosso à Berlin par exemple http://www.infoladen.de/ ; ou centre culturel autogéré "Rote Flora" à Hambourg http://www.roteflora.de), mais aussi sur ceux des espaces autogérés français. Celui des Tanneries à Dijon propose une zone de gratuité, un potager collectif, une carpothèque, un laboratoire photo, un atelier vélos, un projet éolienne, une salle d’exposition, un centre d’aide juridico-pratique pour les squats...

Ouebographie

– L’Espace Autogéré des Tanneries, ouvert en octobre 1998 à Dijon, est un lieu de vie collective et un espace d’activités sociales, culturelles et politiques qui s’inscrit dans une démarche anti-autoritaire et anticapitaliste. Tel : 03 80 66 64 81, tanneries@squat.net, http://www.chez.com/maloka.
Ils animent un "atelier d’informatique populaire" - http://print.squat.net

– L’Ekluserie est apparue à Rennes après l’expulsion de La Marmite. Ils viennent d’être à nouveau expulsés, le bâtiment a été détruit.
http://squat.net/fr/gallery/Ekluserie/

– Le site des infokiosques : Infokiosque.net

– Infoladen : http://www.infoladen.de

– Comment monter un squat de A à Z : http://squat.net/fr

– Les "squatteureuses" de Lille : http://lille.squat.net (pour le matériel et les techniques d’ouverture de bâtiments notamment).