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Freinet n’est pas mort

vendredi 6 mai 2005

Instituteur spécialisé, chargé de cours à l’université Paris X Nanterre et militant de l’I.C.E.M. Pédagogie Freinet, Luc Bruliard nous évoque différents aspects d’une pratique pédagogique qui tente de s’adapter, y compris à l’impossible.

Préambule

En octobre 1982, encore normalien, j’entre dans une classe Freinet de la banlieue parisienne : une ruche bourdonnante et paisible avec le ballet silencieux d’enfants travaillant individuellement sur fiches, l’odeur d’encre et de peinture de l’imprimerie où s’affaire une équipe, quelques têtes plongées dans leur lecture, plus loin un groupe organisant le panneau de présentation d’une enquête sur la naissance des bébés. L’instituteur passe d’un groupe à l’autre à la fois affairé et paisible et, pris par l’ambiance, je me mets tout de suite à travailler avec ceux qui ont besoin ou envie de mon aide. C’est comme une révélation, l’illustration pratique de mes aspirations encore imprécises à faire la classe. Depuis lors, je suis resté enseignant Freinet, dans un engagement à la fois professionnel et éthique de promotion d’une école populaire et d’une manière de concevoir l’acte d’enseigner en adéquation avec ma manière de vivre en général. Mais avant d’évoquer ce que je fais aujourd’hui de cette pratique, je pense utile de préciser quelques aspects primordiaux de la pédagogie Freinet et du sens que je donne à mon engagement.

La pédagogie Freinet

La pédagogie Freinet, apparue dans les années 20 sous la houlette de l’instituteur Célestin FREINET (1896-1966), est explicitement iconoclaste. D’abord, elle se veut populaire et prétend apporter une contribution à l’émancipation des "enfants du peuple". Elle prône la coopération (voire l’autogestion, du temps où l’espoir de créer une société socialiste n’avait pas encore été remisé au cimetière des éléphants), la créativité et l’expression et aussi une pédagogie du travail qui s’inscrit à l’encontre des formes habituelles de diffusion du savoir. Là où on pense encore souvent qu’il faut partir du simple vers le complexe, de l’explicatif au démonstrative, la pédagogie Freinet s’appuie, elle, sur le primat de l’expérience et la confrontation immédiate au complexe. C. FREINET a tenté d’élaborer la notion de tâtonnement expérimental pour expliciter cette démarche, mais il l’illustre plus volontiers en usant (voire abusant) de la métaphore : apprendre à faire du vélo se fait en pratiquant, non en étudiant la bicyclette, son fonctionnement et les lois physiques qui permettent d’expliquer le maintien de l’équilibre du cycliste ; apprendre à lire peut se faire naturellement comme apprendre à marcher ou à parler et il n’y a donc aucune raison, sinon l’acharnement liées aux formes scolastiques (c’est-à-dire exclusivement réservées à l’usage de l’école), que cet apprentissage pose tant de difficultés ; l’expression libre - et la pédagogie de communication qui permet l’inscription sociale de cette expression singulière par sa diffusion au groupe classe, aux correspondants ou plus largement encore par l’intermédiaire des journaux scolaires ou du multimédia - aurait des effets cathartiques sur les individus, propres à évacuer leurs inhibitions, leurs angoisses, leur violence et qui leur permettrait d’investir le domaine scolaire. Surtout, la pédagogie Freinet travaille sur le désir en prétendant clairement "qu’on ne donne pas à boire à un cheval qui n’a pas soif".
Enfin, C. FREINET a le bon goût de ne pas vouloir rester seul. Il crée un mouvement de pédagogues, d’individus qui, attachés qu’ils soient au service public et au fonctionnariat, se situent à la fois en marge de la majorité des enseignant-e-s se contentant d’appliquer directives et injonctions.

Peut-on être militant-e pédagogique
au XXIe siècle ?

Après ces années de pratique et de cohabitation avec la pédagogie Freinet et le mouvement pédagogique qu’y s’en réclame (I.C.E.M. Pédagogie Freinet), je reste très attaché à l’ancrage populaire de cette pédagogie qui va au-delà des discours convenus sur une égalité formelle des chances et son cortège de mesures de soutien. Il est nécessaire de remettre en cause les contenus scolaires et leurs modes de diffusion à l’école. Pour autant, la réalité sociologique l’emporte sur la bonne volonté des acteurs et actrices et la seule action pédagogique ne peut être en soi vecteur de changement social. Passée l’illusion du rôle déterminant du militantisme pédagogique, social et politique et de celui d’avant-garde éclairée de l’innovation que seraient les mouvements pédagogiques marginalisés puis récupérés par le réformisme politique, une fois acceptée l’idée que le grand innovateur en termes de structures et de pratiques pédagogiques, c’est bien l’Etat, on peut alors considérer sereinement le possible.

Pourquoi, dès lors, s’engager encore dans une organisation aussi imparfaite dont les effets sont si limités ? Tout d’abord, parce qu’un mouvement pédagogique est un cadre rare où des praticien-ne-s peuvent se rencontrer, parler, échanger en échappant à la tutelle des supérieur-e-s hiérarchiques, des formateurs-trices et des impératifs catégoriels. Ces rencontres sont d’une grande convivialité (qui n’est pas pour autant fusionnelle ou sectaire) et très formatrices sur le plan pédagogique (échanges, approfondissements et formalisation de pratiques, créations d’outils pédagogiques, analyse critique collective de l’école). Les mouvements permettent ensuite aux enseignant-e-s d’éviter une solitude dommageable pour l’exercice de leur profession. Dans ce rôle d’accompagnement professionnel et de promotion des idées progressistes en éducation, soulignons l’existence parallèle à celle de l’I.C.E.M. Pédagogie Freinet d’autres mouvements pédagogiques de grande qualité (voir encadré).
Un autre aspect déterminant de cet engagement au sein du mouvement Freinet est cette pédagogie du travail qu’il continue de promouvoir. L’idée d’une émancipation par le travail (non aliénant parce que choisi et motivé) reste, à mes yeux, primordiale auprès d’enfants pour lesquels le travail de leurs parents demeure souvent une notion floue. La nécessité de mettre la main à la pâte, d’inscrire le savoir dans une construction matérielle, de rompre avec une conception purement scolaire des apprentissages (comme faire des problèmes pour trouver la bonne opération et non pour trouver quelque chose d’effectif) est essentielle, ce qui ne signifie évidemment pas pour autant mettre en exergue une prétendue intelligence pratique aux dépens de la réflexion et de la recherche plus théoriques ou abstraites.

Ces pratiques pédagogiques singulières doivent cependant échapper à deux écueils : rester marginales ou se contenter d’être des professions de foi sans applications réelles comme, par exemple, quand les règles de vie prétendument élaborées par des conseils
d’enfants ne font qu’entériner une suite d’interdictions et de commandements ou quand les coopératives de classe et d’école sont utilisées comme tiroir-caisse alors qu’elles devraient être gérées avec une participation maximale des enfants. C’est ce que je tente d’éviter dans mes différentes pratiques.

Instituteur en CLIS

Depuis septembre 1994, je travaille dans une classe jusque-là inédite : la "classe d’intégration scolaire" ou CLIS. Il s’agit, selon les termes de la circulaire de novembre 1991 d’une CLIS 1, composée d’enfants relevant du handicap mental dont l’effectif est limité à 12. En fait, c’est une classe de perfectionnement hâtivement "réaménagée" en CLIS et qui accueille en principe des enfants relevant du handicap ou de la déficience mentale.
La tâche la plus ardue pour un-e enseignant-e de classe spécialisée qui arrive dans une école n’est pas forcément de faire la classe mais peut-être d’échapper à la stigmatisation implicite de cette classe. À l’image
traditionnellement désastreuse du perfectionnement s’est, en effet, substituée une acceptation caritative du milieu ou une cohabitation aseptisée. Il en résulte un phénomène d’"insularisation" qui s’exprime sous forme de détails (in)signifiants : lors du décompte des élèves (les élèves de CLIS ne sont pas comptabilisés avec leurs homologues des classes banales) ; par l’absence de référence de cette classe dans nombre de textes concernant les sorties, les activités sportives etc. ; sans oublier le regard dubitatif des représentant-es de maisons d’édition qui disposent rarement d’outils pédagogiques adéquats.
Ce qui m’intéresse dans cette classe, c’est l’idée d’intégration. C’est à la fois mon objectif sur le plan professionnel mais aussi en tant que citoyen attaché au service public car, on l’oublie bien souvent, les enfants handicapée-s sont astreint-e-s à l’obligation scolaire mais leurs parents éprouvent parfois toutes les peines du monde à trouver une structure adéquate pour remplir cette obligation. De plus, l’aspect pionnier de ce travail sur un poste nouvellement créé est séduisant et m’offre une bonne liberté de manœuvre.

Du point de vue de l’intégration, je décide, stratégiquement, la pratique du cabotage. Au départ, avant de travailler avec les autres, il faut d’abord faire ses preuves, en tant que pédagogue et en tant que membre de l’équipe. L’instauration de la classe coopérative facilite les choses car elle permet à la fois l’émergence d’un groupe créatif, dynamisé et stimulant. La classe accueille donc des enfants handicapé-e-s mais aussi des chiens perdus sans collier, enfants bolides inclassables pour lesquels il n’y a pas de structure d’accueil convenable aux alentours. À partir de 1995, une aide - éducatrice, rémunérée par la municipalité, intervient à l’heure du repas et l’après-midi, apportant une aide précieuse à la classe. Les actions d’intégration se mettent en place progressivement :

– participation de la classe à l’ensemble des activités organisées par l’école : journal d’école, sorties scolaires, fêtes etc. ;

– décloisonnements réguliers avec d’autres classes pour les activités sportives, des activités de lecture de textes prescriptifs avec réalisations (bricolage, recettes) ;

– réalisation de productions un peu spectaculaires : participation à des concours (O.C.C.E, municipalité), à des spectacles, à la rencontre d’enfants organisée lors de la commémoration du centenaire de C. FREINET en 1996, à la remarquable revue pour débutants lecteurs J MAGAZINE ;

– intégrations partielles ou complètes d’enfants en classe banale pour des activités d’apprentissage ;

– accueil (restreint et coordonné) d’enfants de classe banale en difficulté scolaire pour des activités d’apprentissage.

Ce travail, qui ne serait possible sans la collaboration active de nombreux/ses collègues de l’école, se démarque de plus en plus de la conception traditionnelle du "maître d’école". Car l’organisation d’une classe qui comprend si peu d’élèves se révèle, en fait, particulièrement complexe : entre les décloisonnements, les intégrations individuelles et les sorties sur temps scolaire pour consultations et rééducations en tout genre, (sans oublier les réunions de synthèses et autre commissions d’orientation), ce n’est pas le trop plein d’élèves qui pose problème mais leur volatilité. Il en résulte bien des difficultés à maintenir la cohésion et la dynamique d’un groupe aussi restreint et dispersé. Dans ce domaine, la pédagogie Freinet et ses techniques représentent une aide précieuse afin de permettre à chacun de travailler à son rythme et selon ses besoins tout en maintenant une vie sociale collective nécessaire à la structuration des élèves.
Le travail d’intégration des enfants handicapé-e-s ou en grosses difficultés scolaires est néanmoins difficile car il requiert beaucoup de plasticité, plasticité qui ne doit pas se confondre avec un reniement de ses propres valeurs. Sa mise en place est souvent laborieuse et, une fois effectuée, l’abandon de certaines "prérogatives du maître" quand le travail d’acquisition des contenus scolaires (souvent faibles) est désormais dévolu aux collègues de classe banale, n’est narcissiquement guère valorisant. De surcroît, l’enfant inté-gré-e dans une autre classe retrouve le plus souvent des modalités d’apprentissage qui ne correspondent pas forcément à mes propres convictions. Toutefois, cette perte d’autonomie pédagogique est compensée par la diffusion plus intense au sein de la vie de l’école de l’idéologie du progrès et du refus du fatalisme scolaire et social. Oui, des enfants handica-
pé-es peuvent apprendre et réussir scolairement au-delà de nos attentes. Oui, des enfants insupportables et violent-e-s, désespéré-e-s de et par l’école peuvent être canalisé-e-s par la mobilisation intellectuelle. Mais plutôt qu’une tentative de modélisation abstraite, il s’agit avant tout de prôner une réflexion tâtonnante, empirique et combien parfois limitée et dont les enseignant-e-s de terrain sont les véritables acteur-trices.

“Instit” Freinet à l’université

Les techniques Freinet ne se réduisent pas à des recettes pédagogiques, elles contribuent à un art d’enseigner qui mobilise plus globalement la personnalité de celui/celle qui les applique. En guise d’exemple, le transfert de ces techniques dans d’autres cadres d’enseignement est possible, comme en témoigne leur mise en place modeste dans un "cours de fac".
Quand j’ai accepté une charge de cours de 50 heures par an pour des étudiant-e-s d’Année préparatoire à la Licence de Sciences de l’éducation, je ne me voyais guère parler 25 fois 2 heures de suite. J’ai alors eu envie de dynamiser les échanges horizontaux (entre les étudiants) et distiller quelques principes directeurs de la pédagogie Freinet : pédagogie de la créativité, de la communication et du travail productif (non aliénant).

Pareils principes ne doivent pas être affirmés sans prendre en compte un certain nombre de contraintes : public adulte (aux manières de penser plus rigides que les enfants du primaire) ; limite des deux heures /semaines ; absence de lieu investissable (une salle où l’on puisse entreposer, afficher etc.) ; absence de moyens financiers (pour rémunérer les intervenant-es éventuel-le-s, acheter un peu de matériel etc.) ; manque de disponibilité (instituteur à plein temps ne venant à la fac que le soir du cours).
Pour autant, la mise en place progressive de techniques Freinet reste possible et se traduit par :

– un "entretien" collectif et introductif au cours d’une dizaine de minutes qui fait office de sas entre l’extérieur et le cours proprement dit. Les étudiant-e-s y font part librement d’informations lues, entendues, vues sur le thème de l’éducation, voire de soucis plus personnels issus de leur milieu professionnel ou familial ;

– la participation active des étudiant-e-s : animation, présidence et secrétariat de séance. Après quelques séances introductives, des groupes d’étudiant-e-s prennent en charge le cours : exposés, présentations de documents, invitation d’intervenant-e-s, pratiques de formation sont proposées au groupe en guise de programme du cours. Un-e président-e de séance étudiant-e organise les échanges et
un-e secrétaire assure un secrétariat officiel à ranger dans un classeur et mis à disposition des étudiant-e-s absent-e-s ou qui auraient pris des notes trop parcellaires ;

– un outil de régulation du fonctionnement : le conseil d’E.C. C’est un conseil qui se formalise progressivement et qui sert de cadre de régulation du cours ;

– la réalisation d’une publication. Il s’agit d’un document dont le contenu, la forme et le destinataire sont à fixer collectivement, la réalisation intellectuelle et technique étant à la charge du groupe. Une note décidée en commun fait office d’évaluation. En fait, on y trouve généralement des interventions sur le statut d’étudiant-e, sur les arcanes de l’année préparatoire (du genre "les ancien-ne-s vous conseillent") ou sur des contenus et événements qui les ont touché-e-s plus particulièrement.

Cette petite expérience d’enseignement à l’université me semble utile, ce pour deux raisons principales :
La première est plus strictement d’ordre pédagogique. Quelques années d’expérience m’ont permis de constater les difficultés récurrentes des étudiant-e-s à respecter quelques consignes simples (et rédigées à leur intention), notamment dans l’organisation et la présentation d’un exposé, dans la rédaction d’une fiche de lecture, et dans le rapport (parfois infantile) qu’ils/elles entretiennent à la notation. De plus, nombre d’entre eux/elles ne comprennent pas clairement les consignes. Or, en partant du constat réitéré que ces étudiant-e-s ne sont ni idiot-e-s, ni inattentifs ou inattentives, ni démotivé-e-s, je vois confirmée l’idée que ces difficultés rencontrées sont liées à leur rapport à la scolarité. Ce qui ouvre encore des perspectives quant aux difficultés supposées des enfants à interpréter ce qui nous semble des consignes évidentes...
La deuxième est plus directement liée à la particularité du public étudiant. L’année préparatoire en sciences de l’éducation accueille pour l’essentiel, des jeunes qui ont raté d’autres cursus ou qui ont été orienté-e-s vers des diplômes professionnels de faible valeur scolaire. Ils/elles cherchent en fait, via la licence en sciences de l’éducation, à intégrer l’I.U.F.M.. Une grande majorité est également issue des milieux populaires ou de l’immigration. Quand on connaît aujourd’hui l’embourgeoisement de la profession d’enseignant-e, il n’est sans doute pas inutile d’encourager et d’armer autant que se peut, ces candidat-e-s enseignant-e-s issu-e-s des banlieues. Le parcours universitaire est pour eux/elles un chemin parsemé d’embûches car si les qualités intrinsèques ne leur manquent pas, l’absence de connaissance institutionnelle du système universitaire les fait échouer ou abandonner faute de quelques conseils avisés. Soulignons aussi un manque évident de culture générale dans le domaine des sciences humaines et sociales (entre Freud et Didier Derlich il n’y a parfois guère de différence !), une architecture intellectuelle sommaire (la différence entre cause à effet et corrélation ne va pas de soi) et surtout une très grande difficulté à situer leur niveau et leurs capacités.
Dans un tel contexte, la multiplication des échanges horizontaux, la demande d’une réflexion singulière qui articule expérience, travail intellectuel et questionnement, la réalisation d’une (modeste) production me semblent être des éléments porteurs d’une prise de conscience du rapport au savoir de chacun et permettent de percevoir les ajustements nécessaires pour s’inscrire plus lucidement dans un projet professionnel.
Aussi modeste soit-il, ce travail me semble contribuer à la promotion, à travers l’application des principes de la pédagogie Freinet, des étudiant-e-s issu-e-s des milieux populaires dont l’école a besoin pour éviter que l’écart social entre les enseignant-e-s et ceux dont il/elles ont la charge ne se creuse avec les conséquences fâcheuses que l’on connaît déjà.

En guise de conclusion

Il est vraisemblable que le militantisme pédagogique tel qu’on l’a connu (par des regroupements bénévoles, en dehors du temps de travail et sans reconnaissance institutionnelle) deviendra au fil du temps une donnée de plus en plus rare, pour des raisons qui tiennent autant à l’évolution sociologique des enseignant-e-s qu’à l’organisation institutionnelle et aux changements sociaux. Toutefois, les difficultés rencontrées par nombre d’enseignant-e-s qui ne trouvent pas dans le fonctionnement des établissements, la bureaucratie envahissante, l’ennui désabusé ou la colère stérile, de quoi mettre en adéquation leur travail et leur éthique de vie, ces difficultés permettent sans doute de penser que les mouvements progressistes continueront d’accueillir ceux et celles qui veulent agir sur un système à la fois écrasant mais pas imperméable, ceux et celles pour qui les jeunes des milieux populaires ne sont pas que des "sauvageons" à enfermer ou des inactifs et des inactives à assister, ceux et celles pour qui "convoiter l’impossible" n’est pas qu’une formule romantique et politiquement désuète, bref ceux et celles qui continuent à croire en des lendemains qui vivent sinon des lendemains qui chantent. Il ne reste plus à l’institution qu’à leur donner un coup de pouce.

Luc Bruliard